Le master « Livres et médiations »(LiMés) co-organise, avec les universités d’Amiens et de Paris IV-Sorbonne, un colloque sur les éditions Verticales les 13-14 avril (à Poitiers) et 18-19 avril (à Paris).

« Editions Verticales 1997-2017 : éditer et écrire debout »

En partenariat avec la Maison des Ecrivains et de la littérature

Comité d’organisation :

Aurélie Adler (Amiens)

Stéphane Bikialo (Poitiers)

Karine Germoni (Paris-Sorbonne)

Cécile Narjoux (Paris-Sorbonne)

 

Comité scientifique :

Olivier Bessard-Banquy (Bordeaux)

Fabien Gris (Paris)

Raphaëlle Guidée (Poitiers)

Julien Lefort-Favreau (Sherbrooke / Queen’s) 

Judith Mayer (Paris 13)

Jérôme Meizoz (Lausanne)

Martin Rass (Poitiers)

Julien Rault (Poitiers)

Lionel Ruffel (Paris 8)

Dominique Viart (Paris 10)

 

Présentation de « Verticales »

Verticales est une maison d’édition française créée en 1997[1] par Bernard Wallet, dont le nom « est inspiré du titre des recueils de poésie de Roberto Juarroz. C’est une façon d’affirmer une éthique. Être ni horizontal, ni à genoux. ». Publier, ajoute B. Wallet, est une façon de militer « de manière masquée », avec l’idée que « la verticalité est un moyen de lutter contre la normalisation ».

En 1997 paraissent Livre XIX de Claro et Prière d’exhumer d’Yves Pagès. Les premiers auteurs s’investissent immédiatement dans la maison : en 1998, Y. Pagès devient assistant de B. Wallet et Claro correcteur. Trente ouvrages paraissent très vite, parmi lesquels quelques succès[2] mais c’est insuffisant pour l’actionnaire. La maison est rachetée par les éditions du Seuil fin 1999.

En 2000, entrent dans l’équipe Jeanne Guyon et le graphiste Philippe Bretelle.

En 2005, Le Seuil est racheté par la Martinière et Verticales par Gallimard. Verticales devient « Les Éditions Phase-Deux » lors de la rentrée littéraire de 2005 (livres d’Arnaud Cathrine et de Camille de Toledo). Mais depuis le 1er décembre 2005, la maison est présentée sur le site de Gallimard comme une « collection ».

Après le départ de B. Wallet en 2009[3], Jeanne Guyon et Yves Pagès deviennent les deux éditeurs de la maison ou de la « collection ». Le catalogue comprend près de 150 auteurs publiés en 20 ans, dont une quarantaine ayant publié plusieurs ouvrages chez Verticales.

 

Présentation du projet

Le colloque « Verticales 1997-2017 : éditer et écrire debout » se consacrera à l’histoire, à la situation actuelle, au positionnement dans le champ de l’édition contemporaine, aux choix éditoriaux, aux auteurs de la maison d’édition à l’occasion de ses 20 ans d’existence, avec un pan centré sur les enjeux éditoriaux et un autre sur les enjeux d’écriture (fiction, style… ) des œuvres éditées au sein de la maison. En accord avec l’esprit et le catalogue de la maison, ce colloque sera multi-lieux (universités de Paris-Sorbonne et de Poitiers, lieux culturels comme le « Plan B » à Poitiers et « Le Point éphémère » et la « Maison de la poésie » à Paris), polyphonique et multi-supports (table-ronde d’auteurs sur « les écritures collectives / collaboratives » ; « le travail auteurs-éditeurs » ; « l’identité éditoriale » ; lectures performées de J.-C. Massera notamment…).

Les interventions pourront porter sur les enjeux suivants, le colloque souhaitant privilégier les approches synthétiques plus que les monographies.

 

Des éditeurs et des auteurs « verticaux »

  • La « ligne éditoriale » : éclectisme[4] mais attention portée aux œuvres documentaire, essais-récits en sciences humaines (histoire et sociologie en particulier) avec certaines œuvres de N. Caligaris, Ph. Artières, J.-C. Massera, J. Thorens…
  • L’histoire de Verticales : grandes phases artistiques et économiques (avant et après B. Wallet ; avant et depuis Gallimard) ; quel infléchissement de la ligne éditoriale avec le changement d’éditeur, quelle succession ? Quelle répartition entre les deux éditeurs actuels ? ; comment s’opère l’entrée de nouveaux auteurs au catalogue (I. Jude, F. Ciriez, N. Lefebvre…) ;
  • L’identité éditoriale : qu’est-ce qu’être un auteur Verticales, qui sont les « auteurs Verticaux » ?[5] Pourquoi et comment un écrivain rejoint (pour un titre ou pour l’ensemble de son œuvre) ou quitte Verticales ? Quels sont les auteurs qui auraient pu ou auraient dû être publiés par Verticales ? Entrer à Verticales est-ce se poser contre d’autres maisons d’éditions ? Lesquelles et pourquoi ?
  • La visibilité de Verticales : comment exister médiatiquement, comment être « aperçu » ? quel rôle du site (http://www.editions-verticales.com/) avec ses archives, un musée du marque-page, etc. ; l’ouvrage collectif Éditions verticales. Qui est vivant ?; la « propagande » ; la page facebook et la newsletter ; quel impact sur la notoriété et les ventes de la maison d’édition de l’hyper-médiatisation de certains auteurs (F. Bégaudeau, M. de Kerangal…) ;
  • L’évolution de la collection « Minimales » depuis son lancement en 2002. La collection, reconnaissable à son format intermédiaire, sa maquette épurée, mise sur la forme brève entre essai et fiction, nouvelles ou fragments, lettre ou pamphlet. Pour Y. Pagès, la collection peut « révéler de nouveaux auteurs […], faire émerger des voix qui ne correspondent pas aux standards de la fiction »[6]. Comment cette collection s’inscrit-elle dans le projet Verticales[7]?

 

Ecrire autrement (verticalement ?) la fiction

  • La dimension politique et éthique : rester debout face aux menaces de la normalisation, de la propagande du divertissement, pour échapper à une littérature « utile, utilisée, utilitaire, utilisable » (J.-M. Lovay), être « un centre de ralliement des divergences » (B. Wallet). Comment s’exprime la divergence ? Quelle place pour les publications de collectifs militants (GIP, Street Voice…), les essais (Spire, Quessada…) et les rééditions (Grisélidis Réal, Raoul Vaneigem…) dans le catalogue Verticales ? Quel rôle jouent les chroniques de certains écrivains Verticales pour la presse (Transfuge pour Bégaudeau) ou sur internet (le blog de Claro) qui définissent, par rapport à des auteurs Verticales et non-Verticales, des exigences en matière de style, d’éthique et de politique de la littérature ? Quels points communs dans le rapport à la langue ou au discours et sa dimension politique ?
  • La dimension collective : quels sont les espaces créés par les éditeurs pour « créer une sorte de commune, un lieu de regroupement, une centrale d’énergie où les écrivains se rencontreraient, débattraient, feraient des fêtes… » « un lieu où mener des expériences d’écriture singulière et, inséparablement, des expériences collectives dont la littérature serait le cœur » (B. Wallet) ? Quelles sont les manifestations et les marques de la notion de collectif dans l’écriture ? Cette question de l’écriture à plusieurs mains se pose avec acuité à une époque où les ateliers d’écriture bénéficient d’un regain d’intérêt et sont reconnus par l’institution comme l’attestent les masters « métiers de l’écriture », « écriture de création », etc. et où Verticales publie le premier livre d’Elitza Gueorguieva, qui a suivi le master de création littéraire de Paris 8.

 

Pour une langue et un style « à la verticale »

  • L’énoncé éditorialisé : quel travail entre auteurs et éditeurs sur les œuvres une fois le manuscrit remis, dans la construction d’une œuvre publiable ? Les prérogatives des uns et des autres sont-elles explicitées ? À quel niveau les conseils/intrusions interviennent-ils/elles ? Quels rôles respectifs et complémentaires de Guyon et Pagès, du lecteur-correcteur (M.-H. Massardier) et du correcteur (Claro) ; dans quelle mesure la ligne éditoriale infléchit-elle le style de la création ? Quels sont les documents, les témoignages qui infirment ou confirment cette intervention ? ;
  • Un style « Verticales » ? : Existe-t-il des traits ou phénomènes stylistiques identifiables qui font qu’en dépit des styles propres à chaque œuvre ou auteur on pourrait parler d’« un style Vertical » traduisant une vision et des visées bien précises sur le plan esthétique et/ou éthique? En quoi consisterait la verticalité stylistique et, de fait, son repoussoir, l’horizontalité stylistique ? Est-elle décelée par le lecteur, revendiquée, par les auteurs ?
  • Le rapport entre fiction et document, la mise en jeu des genres de discours ordinaires (la langue de tous) et/ou médiatiques, les fictions non narratives, le genre du roman, l’oralité, l’entretien (O. Rosenthal, F. Beaune, J. Sautière…)
  • L’intermédialité : quelles modalités, quels outils linguistiques permettant le rapport étroit avec le cinéma (Rosenthal), la danse (Concordanses, Bertina, Obiégly), le dessin (Pierre Senges et Kiloffer, Nicolas de Crécy, Pierre Marquès/Mathias Enard, Onuma Nemon) et la photographie (pour Bertina et Kerangal), la musique (Dominique A, B. Cantat, Jean-Charles Massera et Pascal Sangla) ?

 

 

Les propositions de communication (1500 signes) devront parvenir à aurelieadler@gmail.com; stephane.bikialo@univ-poitiers.fr; karinegermoni@gmail.com; cnarjoux@gmail.com avant le 6 janvier 2017 pour décision du comité scientifique au cours du mois de janvier et parution définitive du programme du colloque début février 2017.

 

[1] Avec le soutien financier de l’éditeur Slatkine (et un logo conçu par Robial).

[2] En 1998, Régis Jauffret, Histoire d’amour : près de 6000 exemplaires vendus, avec une parution en Folio.

[3] Voir à ce sujet B.W. de Lydie Salvayre,Seuil, 2010.

[4] Le Matricule des anges, n° 24, octobre 1998 : le « catalogue mise sur l’éclectisme. Il fait la part belle à la fiction française, avec un intérêt affirmé pour la découverte de jeunes auteurs, tout en élargissant son champ à la sociologie, à l’histoire par exemple (textes sur le communisme, témoignages sur la guerre d’Espagne, mai 68 côté murs et graffiti). Cette diversité traduit moins une volonté qu’une attitude : celle d’éclairer notre époque sous des angles différents, d’interroger et de mettre en perspective nos conditions d’existence, avec jamais « l’oubli du politique sous le littéraire ». »

[5] Voir la préface de Qui est vivant ?

[6] « « Minimales », en marge du roman », Le Monde des livres, 17.10.02.

[7] En 2007, Pascal Mougin pointait l’ambivalence d’une stratégie d’émergence dans « Pour une sociologie des collections littéraires. L’exemple de « Minimales » des éditions Verticales », in Ph. Baudorre, D. Rabaté, D. Viart (dir.), Littérature et sociologie, Presses Universitaires de Bordeaux, 2007, p. 193-205.

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Stéphane Bikialo

Maître de Conférences en Langue et Littérature françaises (7ème et 9ème sections) à l’Université de Poitiers, s’intéresse aux rapports entre langue et style dans la prose poétique des XXème et XXIème siècles (Claude Simon, Nathalie Sarraute, Samuel Beckett, Julien Gracq, Michel Leiris, Bernard Noël). Il travaille actuellement sur la dimension politique de la langue et le rapport au réel dans la littérature contemporaine, (Lydie Salvayre, Leslie Kaplan, Jean-Charles Massera). Dernières parutions : « "J’ai un clou sur la langue". Phraséologie néo-libérale et langue littéraire au XXIème siècle », L’Information grammaticale n° 130 : Le Français au 21ème siècle : continuité et évolution (dir. M.-A. Morel et C. Narjoux), juin 2011. Dans l’atelier du style. Du manuscrit à l’œuvre publiée, La Licorne n° 98 (dirigé avec S. Pétillon), PU Rennes, juin 2012. Coïncidences du dire : Jacqueline Authier-Revuz et Bernard Noël », dans L’Hétérogène à l’œuvre dans la langue et les discours. Hommage à Jacqueline Authier-Revuz (textes réunis et présentés par Sonia Branca-Rosoff, C. Doquet, J. Lefebvre, E. Oppermann-Marsaux, S. Pétillon et F. Sitri), Lambert-Lucas, 2012.