Cinq étudiantes de M1 se sont rendues à cette nouvelle édition de la Journée des Editeurs Indépendants, au coeur de la Cité de l’Ecrit de Montmorillon. Objectif: découvrir un lieu unique dans notre région et récolter les témoignages de ces représentants d’une part du monde éditorial qui peine parfois à être médiatisée. Aperçu.

Des éditeurs militants:

Quelques mots suffisent à lier conversation avec de vrais passionnés. Des amoureux de leur art qui défendent leurs valeurs contre vents et marées. C’est le cas de Cécile, qui n’a pas hésité à venir de Corèze pour promouvoir l’association Akha Biladjo!. Après avoir travaillé au Laos pendant plus de 10 ans, elle revient avec le fruit de ses rencontres: des immenses créatures de tissu qu’elle nomme « Escogriffes ». En co-écriture avec une dessinatrice et un photographe, elle crée des bandes dessinées pour enfants mettant en scène ces petits personnages, et donne même aux petits lecteurs les clefs pour les fabriquer de leur mains! Nous nous sommes prêtées au jeu pour trois heures d’évasion. Son projet très original d’auto-édition et d’ateliers créatifs est soutenu par la région et lui a ouvert les portes du dernier salon du livre de Paris.

Atelier création avec Akha Biladjo!

Yves vient la voir de temps en temps. Ce n’est pas la première fois qu’ils se rencontrent sur ce genre de manifestations. Il représente les éditions APEIRON. Ce curieux personnage fait défiler pour nous les pages de son « livre magique », nous conte les histoires dessinées sur ses extraordinaires cartes postales, ou nous lit quelques uns de ses poèmes illustrés. Sa marque de fabrique: des livres hybrides. Les peintres se marient aux poètes pour faire naître une merveille qui se parcourt dans les deux sens. Les couleurs jaillissent, et l’ambiance et mystique. Yves tables sur l’originalité de sa démarche qui, de fait, ne peut se dématérialiser:

    « Avec une œuvre de ce genre, vous créez un lien intime avec l’objet. Ce n’est plus que de simples pages. C’est l’objet qui raconte une histoire. »

   Joignant le geste à la parole, tel le montreur de curiosités d’un cirque, il parcourt la piste en compagnie des carnets qu’il sort de ses malles des Indes et lit à la cantonade des bouts de littérature.

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Autre homme, autre style. Bertrand Illegems, directeur des Chantuseries, nous fait le passionnant récit des origines de sa maison:

  « A l’origine, il y avait une œuvre collective, née d’un atelier d’écriture. J’avais deux choix: en distribuer des photocopies à tout le monde ou créer une maison d’édition. J’ai créé le Chantuseries avec ce premier livre, qui s’est vendu à 300 exemplaires. »

    La maison existe depuis 5 ans et, grâce à la passion de son créateur, lui-même écrivain, possède désormais un catalogue très riche sur des thèmes aussi variés qu’un témoignage de médecin de guerre, un polar régional ou une vie de Jésus transposée en version années 2000! Cependant, Bertrand ne vit pas des revenus de sa maison. Ce qu’il gagne, il le réinvestit dans son catalogue.

« J’ai pu monter ce projet car je suis à la retraite après 40 ans de journalisme. Je n’ai pas besoin d’un revenu supplémentaire pour vivre. Mon projet ne me rapporte pas un centime; mais la maison vit, le budget est équilibré et j’arrive à payer convenablement mes auteurs. J’en suis très fier, et je n’ai d’ailleurs pas besoin de faire d’appels à textes. Je reçoit une trentaine de manuscrits par an, parmi lesquels se trouvent les deux que je publierai sur la même période. »

« Je démarche moi-même les libraires. Cela marche assez bien. On sait quand on a affaire à un bon libraire, qui saura mettre en valeur ce que vous lui proposez. Grâce à un jeu concours, un seul d’entre eux a réussi à vendre une centaine d’exemplaires d’un polar! Ce genre de liens, c’est ce pourquoi j’aime faire tout ça. »

 

Un lieu unique en France, qui peine à se faire connaître:

Rues tortueuses, devantures peintes, bouquinistes de tous styles… Cette cité médiévale a de quoi séduire. Nous avons passé des heures dans ces cavernes d’Ali-Baba et avons toutes fondu pour l’ambiance magique de ce temple des bibliophiles.

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Et pourtant, le lieu est désert. Les devantures fermées n’ouvriront leur portes qu’à partir de 14h, malgré la manifestation. A nos yeux, l’événement manquait de visibilité. Peut-être nécessiterait-il de changer de nom, afin d’attirer un plus large public. Ce lieu exceptionnel manque cruellement de rayonnement et d’animation! Il semble s’être figé en lui-même, comme une sorte de musée ou de reconstitution grandeur nature, qui ne vit plus qu’à la saison touristique.

Un nouveau projet, global et engagé, suffirait à l’animer et à faire parler de lui. Une piste pour de futurs stages? A laisser mijoter…